Comment aborder les trois consultations CSE ?

Par Philippe Lesueur-PicotLe 8 août 2018

Depuis le passage en CSE, de nombreux élus s’interrogent sur l’étendue des consultations CSE obligatoires. Les récentes évolutions de notre droit du travail ont quelque peu plongé les représentants du personnel dans le désarroi le plus total. Bien que d’importants changements aient modifié d’anciennes pratiques qui avaient cours au temps du comité d’entreprise (CE), certaines mesures demeurent inchangées.

C’est le cas en ce qui concerne les trois consultations CSE (article L2312-17 du Code du travail).

Elles sont toujours prévues et observées annuellement dans toutes les entreprises d’au moins 50 salariés. Ainsi, le comité social et économique (CSE) est consulté sur les orientations stratégiques de l’entreprise. Il l’est également en ce qui vise la santé de l’entreprise. Il peut tout autant émettre un avis quant à la politique sociale retenue par l’employeur au profit des salariés.

La BDES au service des 3 trois consultations CSE

Être consulté c’est évidemment un droit indissociable de la mission des élus du CSE. Cette faculté offerte par le Code du travail fait partie intégrante des prérogatives de cette instance du personnel. Elle s’inscrit dans la continuité du comité d’entreprise (CE). La consultation implique l’ouverture d’un débat entre les élus et l’employeur. Celui-ci est ensuite ponctué par l’avis consultatif du CSE avant d’être définitivement clos par la réponse qui précédera la décision définitive de l’employeur.

Tout cela est parfaitement orchestré par les règles en vigueur dans notre droit du travail.

Avant d’être consulté, faut-il déjà être informé

Toutes les fois où il est question de « consultation », n’oublions pas la 1ère étape : l’information du CSE. Le débat induit par la phase consultative ne peut s’entendre qu’une fois les élus informés des tenants et des aboutissants. Qu’il s’agisse de faire le constat d’une situation ou de discuter d’un futur projet, il est évident que le CSE va devoir préalablement plancher sur le sujet. C’est comme cela que le Code du travail l’indique ; l’article L2312-15 dispose que le CSE bénéficie d’un délai d’examen (entendez délai de préparation) à la lumière des informations écrites transmises par l’employeur.


Ajouté à cela, l’article R2312-7 du même code. Il nous enseigne que la base de données économiques et sociales (BDES) constitue la source d’information à exploiter pour les trois consultations CSE.


La BDES concourt à l’éclairage global des élus quant à la manière dont l’entreprise est effectivement gérée par l’employeur. Les données, les documents, les commentaires participent à donner une vision claire et précise de la situation économique et sociale. La BDES repose sur des règles strictes en ce qui concerne son architecture, son contenu, sa mise à jour, son enrichissement… Les élus du CSE doivent veiller à ce que l’employeur respecte à ce propos, la législation en place.

Les consultations CSE précédées par une réunion de travail

Cela va de pair avec la BDES. Il est vivement conseillé de se réunir le temps d’une réunion préparatoire afin de structurer le discours des élus lors de la séance plénière. Lors d’une telle réunion de travail, les élus vont rédiger les questions révélées par la compréhension qu’ils auront des informations mises à leur disposition par l’employeur. Il faudra dans la foulée en profiter pour réfléchir aux propositions que les élus pourraient soumettre à l’employeur le cas échéant. Le but des consultations du CSE est de permettre à cette instance de peser dans les décisions pouvant être prises par l’employeur.

Certains protagonistes nomment cela le pouvoir consultatif du CSE.

Il est vrai que bien utilisé, le cadre consultatif se traduit par un vrai pouvoir d’influence. Faut-il que les élus soient formés aux missions économiques et sociales. Ce n’est pas toujours le cas, ce qui constitue un frein à la qualité et à l’efficacité des consultations. Des élus ignorants du fonctionnement d’une entreprise et des impacts pour les salariés qui y travaillent risquent de passer à côté de leurs obligations. Il est possible d’y remédier en décidant de souscrire à la formation économique, sociale et syndicale (voir notre page sur la formation CSE) – CFESS ou en complément, à toute formation traitant de ces sujets.

La consultation sur les orientations stratégiques

C’est sans nul doute, la plus importante des trois consultations CSE. C’est elle qui va déterminer tout le reste. Mais que devons-nous comprendre par « orientations stratégiques » ? Cette notion purement économique exprime une finalité assez simple à comprendre. L’entreprise doit être capable d’affronter le changement et d’anticiper les impacts sur ses résultats. Pour cela, elle va entreprendre afin de poursuivre la pérennisation de sa croissance.

Comment ?

En anticipant ses futurs besoins par des logiques d’investissements, de réorganisation, de repositionnement, etc. L’entreprise va mobiliser ses ressources créatives, marketing, commerciales et professionnelles afin d’y parvenir.

Les orientations stratégiques traduisent en langage économique, l’agrégation de toutes ces ambitions qui participent à l’essor de l’entreprise.

Il s’agit pour l’employeur de faire part de sa complète vision pour le futur de l’entreprise en la nourrissant d’explications afin d’en démontrer toute l’efficience. Et c’est précisément la raison pour laquelle, les membres du CSE sont en droit d’être au fait de cette vision. Leur rôle étant de représenter les intérêts des salariés et de concourir en particulier au maintien de tous les emplois, il ne pouvait pas en être différemment.

Lors de cette consultation, les élus doivent visualiser les futures évolutions de l’entreprise et analyser la place des salariés en son cœur.

Le but est de préserver au mieux de leurs intérêts, tous les acquis sociaux afin que nouveauté ne rime pas avec désordre social. L’employeur n’est pas toujours sensible aux reculs sociaux qu’induisent parfois des stratégies d’entreprise. L’équilibre entre la réussite d’une entreprise et les bénéfices que peuvent en retirer les salariés, n’est pas simple à respecter.

Mise en garde

Ce sont aux élus qu’il incombe de le faire respecter ou de le rétablir le cas échéant.

La consultation sur la santé économique et financière de l’entreprise

Ce rendez-vous annuel qui s’établit généralement dans les 6 mois après la clôture des comptes de l’entreprise est très important. Il permet de disposer des réponses quant à la santé économique de l’entreprise. Les résultats de l’exercice clos (c’est-à-dire de l’année précédente) peuvent en dire long sur ce que traverse l’entreprise (article L2312-25 du Code du travail).


Sont aussi passés au crible, la politique de recherche et de développement technologique de l’entreprise, l’utilisation des crédits d’impôt comme le CICE, le bilan social, le rapport de gestion et du commissaire aux comptes, etc.


L’analyse des comptes annuels et des budgets prévisionnels apporte un complet éclairage sur la compétitivité de l’entreprise et la santé de ses résultats. Les élus vont lors de cette consultation du CSE être au fait des activités qui sont rentables de celles qui peinent à sortir leur épingle du jeu. L’objectif d’une telle prérogative économique, c’est de permettre aux élus d’être conscients de la réalité de l’entreprise afin de ne pas cultiver ni l’utopie ni la peur de l’avenir.

Les salariés ne sont jamais plus efficaces que si l’employeur sait les rassurer en les associant à son développement.

La consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi

Cette troisième consultation du CSE est très importante (article L2312-26 du Code du travail). Elle touche au cœur de l’activité des élus du CSE. En effet, les représentants du personnel vont pouvoir discuter des conditions d’emploi et de travail des salariés en opérant des éclairages précis (temps de travail, précarité de l’emploi, égalité professionnelle, formation des salariés, contrôle de l’activité…). Le but de cette consultation est d’aborder avec lucidité le sort social réservé aux salariés.

Mise en perspective avec la situation économique de l’entreprise et les orientations stratégiques, cette consultation permettra de déceler les priorités de l’employeur pour son entreprise.

Mettra-t-il l’accent sur une meilleure gestion du temps de travail, sur des mesures visant à lutter contre la pénibilité et l’épuisement professionnel ? Enverra-t-il des signes positifs en direction des salariés à propos des rémunérations, de l’accès aux formations ? L’employeur investira-t-il dans le matériel ? Le CSE aura fort à faire pour tenter de percer à jour les ambitions de l’employeur en matière de politique sociale.

Confier la préparation des consultations CSE à un expert

La législation permet au CSE d’être épaulé par un expert-comptable. À l’occasion des consultations CSE, il est du ressort des élus d’en désigner un. Ce professionnel est compétent pour aider les élus à préparer les consultations CSE. Le financement de ces expertises est assuré par l’entreprise à l’exception de celle portant sur l’étude des orientations stratégiques. Pour cette expertise, le CSE devra en financer une partie (20 % de la facture) avec son budget de fonctionnement.

Conseil d'Expert

Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons que trop vous conseiller de vous faire assister d’un expert-comptable à l’occasion des consultations CSE ; l’enjeu est trop grand pour l’aborder sans aucun appui !

Auteur de l'article: Philippe Lesueur-Picot

Avant d’exercer en qualité de Responsable des Ressources Humaines, Philippe Lesueur a également fait ses armes en tant que Responsable Qualité Sécurité Environnement. Confronté très tôt aux problématiques des conditions de travail et des relations au travail, il a bâti des solutions afin de prévenir les risques professionnels.