Élus du CSE, mode d’emploi

Par Isabelle Vidal-LeonLe 18 mars 2018

Les premiers élus du CSE sont arrivés aux responsabilités en janvier 2018. Et pour eux, la longue liste des missions s’annonce comme une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne ? Les élus auront une vue d’ensemble sur ce qu’il se passe dans l’entreprise. La mauvaise ? Ils devront le faire en disposant de moyens de fonctionnement et d’action réduits.

Les élus du CSE (comité social et économique) remplacent trois corps de métier de représentant du personnel. La tâche s’annonce plus rude que jamais.

Les élus du CSE devront se préparer plus précocement

Disons-le d’entrée de jeu, ce serait un crime d’attendre des mois voire des années avant de songer à se former à l’ensemble de ses responsabilités. (Découvrez nos formations CSE) Bien qu’il s’agisse d’une fâcheuse habitude notamment pour les anciens élus du comité d’entreprise, il va falloir y couper court. Se lancer à corps perdu dans l’univers complet et pour le moins complexe du comité social et économique, ce serait une pure folie.

Conseil d'Expert

Les élus du CSE doivent prendre rapidement conscience que le savoir c’est la clé du savoir-faire !

Acquérir des connaissances ne se résume pas à glaner des informations sur le net ou à lire une encyclopédie en 10 volumes sur le fonctionnement du comité social et économique ! Le savoir est transmis par des professionnels, des personnes habituées au traitement de ces sujets. La passion de leur métier de formateur couplée à leur vorace aptitude à avaler des kilos de contenus juridiques nous éclaire sur une chose : apprendre c’est un métier et transmettre l’est encore davantage.

Les formateurs qui travaillent aux côtés des représentants du personnel sont animés par l’envie de les aider à se dépasser pour honorer avec brio leurs prérogatives.

Je côtoie depuis des années des formateurs en tout genre dans mon métier. Il en est un en particulier qui me réconcilie avec l’envie d’apprendre. Il a cette façon bien à lui de vous faire aimer les dessous du métier (comme il se plaît à le dire), d’élu du personnel. Sa passion est née très jeune. Il a été lui-même élu en tant que membre d’un comité d’entreprise (et secrétaire du CE par ailleurs). Il a fait ses armes en tant que délégué du personnel et délégué syndical avant de raccrocher douze ans après.

Depuis 2007, il parcourt les routes de France pour professer ; sa nouvelle passion.

Fabrice ALLEGOET, juriste de formation, pour ne pas le citer (il sera ravi), est un convaincu à en devenir ultra convaincant. Il aime les élus du CSE et il n’imagine pas des entreprises privées de leur existence. Il redoute le temps où cela sera peut-être une réalité. Alors, à sa manière, il nous enseigne l’art de représenter les autres, de porter leur parole et de défendre leurs intérêts. Fabrice aime imager, scénariser. Durant un cours auquel j’ai eu plaisir à assister, j’ai pu constater avec quelle énergie, il se plaisait à faire passer ses messages.

Témoignage

Je voyais bien avec quel plaisir en retour, les membres du CSE buvaient ses paroles, un temps suspendu à ses recommandations, un autre, à ses astuces et conseils de professionnel.

Apprendre les 3 composantes métier des élus du CSE

Si je devais vous résumer en un article de blog, l’essentiel de ce que j’ai retenu, je le ferais en mettant en évidence, les 3 composantes métier des élus du CSE. En effet, l’ensemble des missions auxquelles les élus vont devoir se frotter sont toutes différentes et complémentaires. L’une d’elles est héritée du rôle économique et social du comité d’entreprise (CE) ; l’autre de la mission des délégués du personnel (DP). La dernière est sans doute la plus complexe. Elle nous vient du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

Bien que le formateur ait pris le temps de bien distinguer ses missions particulières, il semble évident qu’il soit nécessaire de poursuivre tout au long de son mandat, une cure d’apprentissage.

Les élus du CSE, artisans de l’amélioration continue

Lorsqu’il s’agit d’évoquer les missions des membres d’un CE, la plupart des gens (et j’en fais partie) songe immédiatement aux activités sociales et culturelles et sans doute encore davantage aux cadeaux à l’occasion de la fête de Noël. Pourtant, il ne s’agit pas là, de la mission principale de cette instance représentative du personnel. Au contraire, un CE dispose de compétences qui peuvent être employées à améliorer les conditions de travail et de vie des salariés dans l’entreprise. Le Code du travail en fait clairement état, bien que peu s’en souvienne. J’ai pu m’en rendre compte durant le stage.

Il appartient désormais au comité social et économique de s’attacher à cette prérogative sans doute centrale dans la vie des salariés au quotidien (article L2312-12 du Code du travail).

Pour agir au profit des salariés, faut-il savoir de quoi il est question. Vouloir améliorer les conditions de travail, l’accès à l’emploi, la professionnalisation des salariés, leur couverture santé, l’accès aux congés pour évènements familiaux et que sais-je encore, c’est indéniablement courageux. Mais le faire sans formation préalable, sans plan d’action déterminé et sans engager un sincère travail d’équipe, c’est du suicide ! Pour aborder ces sujets, il est indispensable d’en apprendre plus sur le fond. Pour présenter un projet à l’employeur, les élus doivent accorder leurs violons, parler d’une seule voix. Faire preuve de concorde et d’unité entre les élus, c’est magnifier la qualité du travail produit.

Et même si je le pense profondément, je dois rendre hommage à l’auteur de cette phrase ; Fabrice. Lors de la formation, il n’a eu de cesse de rappeler à quel point tout cela est important.

La sécurité des salariés passe par un travail de terrain des élus du CSE

L’univers de la santé des travailleurs, des conditions de sécurité des lieux où les salariés exercent leur travail, est étendu. Durant le stage, j’ai pu m’en rendre compte (et les apprenants, aussi). Il a été question spécialement de risques psychosociaux, de danger grave et imminent, de risques professionnels pour la santé des salariés, d’enquêtes accident et d’inspections régulières. Cet univers propre au CHSCT nous oblige à une certaine humilité. J’avais l’impression d’apprendre une langue étrangère. Le vocabulaire riche et très spécifique à ce milieu ne peut être appris qu’à force de pugnacité et de détermination.

Témoignage

La difficulté de cette mission réside à la fois dans la compréhension de cette richesse du langage de professionnel et dans la pluralité des tâches qui la composent.

Le formateur a su mettre en lumière qu’il n’est pas question d’improviser. C’est dangereux pour tout le monde et totalement inapproprié compte tenu de l’urgence de la plupart des interventions. Les élus du CSE, tourmentés par la peur de mal faire, ont posé d’innombrables questions tant le sujet est vaste et la responsabilité immense. Je les ai sentis préoccupés et soucieux. C’est à cet instant précis où j’ai pris conscience que le comité social et économique ne pouvait pas être réduit à la distribution de bons d’achat.

Les réclamations sont portées les élus du CSE

Saviez-vous que les réclamations portées par les élus du CSE ne pouvaient pas être anonymisées ? C’est pourtant dans la pratique, très répandu. Les salariés sont les premiers demandeurs sans se douter que cela les conduirait à l’impasse. Porter à la connaissance de l’employeur des faits possiblement délictuels, contraint à respecter une méthode précise. Dans le cas présent, il est question de droit des salariés. Je n’avais pas conscience avant la formation de l’immensité des thèmes juridiques en matière de droit du travail. Porter une demande oblige à savoir interpréter ensuite les réponses de l’employeur.

Comme nous l’a rappelé le formateur ; « savoir c’est bien, mais comprendre c’est encore mieux ! ».

Le droit des élus du CSE doit être appris

Pour défendre l’application des droits des salariés, il faut être crédible. Le formateur a mis à ce propos en évidence en soulignant certaines contradictions. En effet, comment peut-on se présenter face aux salariés dans le but de défendre leurs intérêts, alors que dans le même temps, les élus peinent à se faire respecter de l’employeur ? Paradoxe soulevé par l’intervenant durant la formation CSE. Il mit en exergue la plupart des travers, supportés malgré eux, voire acceptés des représentants du personnel. Les élus sont régulièrement entravés et rencontrent de grandes difficultés à exister. La légitimité à défendre les autres commence inexorablement par la capacité à se défendre soi-même.

Les élus du comité social et économique ne pouvaient qu’acquiescer à ce discours bien qu’une gêne empreinte d’une certaine colère planait dans l’air.

Ce que m’aura en définitive enseigné ce cours, c’est qu’il n’y a aucune place à l’approximation en matière de droit du travail. Les représentants des salariés doivent se former avant de se mesurer aux défis qui les attendent. Rivaliser d’égal à égal avec l’employeur n’est possible qu’après avoir aiguisé ses connaissances. En droit, rien n’est le fruit du hasard ou de la magie. Dernière phrase en passant de notre formateur dont la richesse du verbe nous rappelle sans détour la richesse de la mission.


Réaction de Fabrice ALLEGOET

Merci à Isabelle d’avoir rédigé un article en forme de témoignage de son expérience issue de la formation à laquelle, elle a participé. Ce fut une jolie surprise ! Cet article est un hymne assez éloquent à propos de la nécessité pour les représentants du personnel de se former. Heureux d’avoir indirectement pu y contribuer.

Auteur de l'article: Isabelle Vidal-Leon

Juriste en droit privé et droit social, Isabelle exerce en indépendante depuis quelques années le métier de conseil aux entreprises et de formatrice en droit social. Elle travaille également depuis quelques années comme consultante auprès des particuliers pour le traitement de litiges divers liés au travail.