Consultation du CSE sur l’organisation du travail

Par Philippe Lesueur-PicotLe 13 mai 2020

L’organisation du travail en entreprise fait l’objet d’un vaste débat. Un savant compromis entre les besoins de l’entreprise et l’intérêt des salariés doit établir les bases. C’est donc un équilibre qui peut basculer si l’un de ces deux éléments change. Quelle que soit la raison qui pousse l’employeur à modifier l’organisation du temps de travail, l’entreprise doit toujours consulter le CSE !

Organisation du travail dans le secteur privé

La version simple reviendrait à penser qu’il suffit que tous les salariés d’un établissement travaillent tous 35 heures, aux mêmes horaires, et à flux d’activité constant. Or, la réalité de bien des entreprises est que l’organisation du travail demande quelques adaptations. C’est particulièrement le cas pour les entreprises qui connaissent un pic d’activité, ou encore celles qui fonctionnent en continu. Chaque entreprise doit alors adapter sa gestion du temps de travail à ses besoins.

L’organisation du temps de travail mise en place devra ainsi s’adapter aux activités et conditions de travail spécifiques de l’entreprise.

Elle devra permettre de limiter le recours aux emplois précaires et aux heures supplémentaires des salariés, tout en optimisant la répartition de la charge de travail. L’organisation du travail devra également permettre une meilleure gestion des absences, notamment en période de congés annuels.

Dispositions quant à la durée du travail

En France, la durée de travail pour un emploi à temps plein est de 35 heures hebdomadaire. Cependant, certains accords ou conventions peuvent prévoir une durée supérieure ou inférieure à 35 heures. Au-delà, les heures effectuées sont considérées comme des heures supplémentaires. Celles-ci bénéficient d’une rémunération majorée, mais ne peuvent excéder un plafond de 220 heures par an. En deçà, le salarié sera considéré comme travaillant à temps partiel.

Nombreuses sont les entreprises qui ont conservé des semaines de 39 ou 40 heures.

Dans ce cas, les salariés accumuleront des heures ou jours de Réduction de Temps de Travail (RTT), pour compenser. La durée hebdomadaire est alors lissée sur le mois, et reste dans la durée légale de 151,67 heures de travail par mois. Selon les postes, notamment ceux dont l’activité n’est pas linéaire sur la semaine ou sur l’année, il est possible de prévoir une durée du travail différente de la durée légale. C’est souvent le cas dans les postes occupés par des cadres, dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre les horaires collectifs. Leur rémunération est lissée sur l’année, absorbant ainsi les variations d’activité.

On parle alors de forfait jours. Sauf accord contraire, la durée du travail ainsi rémunérée est de 218 jours annuels.

Adaptation à la saisonnalité

Dans de nombreuses entreprises, le temps de travail n’est pas quelque chose de linéaire. Prenons l’exemple d’une activité qui connaît une forte saisonnalité. L’employeur doit pouvoir aménager la gestion de ses ressources humaines pour éviter de faire appel à du renfort en période de pointe.

L’employeur peut alors prévoir un aménagement des horaires, sur une période supérieure à la semaine et fixée au maximum à 3 ans.

Le salarié peut ainsi travailler soit plus de 35 heures hebdomadaires, soit moins. L’employeur ou un accord collectif prévoient la mise en place de cet aménagement.

Cas de l’organisation du temps de travail en continu

Si certains secteurs d’activité connaissent une saisonnalité les poussant à ne travailler qu’une partie du temps (industrie du tourisme par exemple), pour d’autres, c’est l’inverse. Prenons l’exemple des usines, ou encore des hôpitaux. Rien ne semble les mettre dans le même panier à première vue, et pourtant. Dans les deux cas, il s’agit de structures qui ne ferment jamais. Une équipe doit toujours être sur le pont. C’est pourquoi il est nécessaire d’établir l’organisation de travail dans ce sens.

La plupart du temps, l’employeur met en place des équipes alternantes. Elles se relaient jour et nuit, en horaires décalés.

Sur les périodes qui semblent plus calmes, la nuit potentiellement, il est alors possible d’avoir recours à un système d’astreinte. Dans ce cas-là, certains employés peuvent rester chez eux, mais doivent pouvoir se rendre disponibles dans un temps prédéfini pour intervenir. Ces astreintes sont bien entendu rémunérées. Elles peuvent être fixées par convention ou accord d’entreprise ou, à défaut, par l’employeur après consultation du CSE. Ne pas confondre le régime d’astreinte avec le régime d’équivalence. Cette dernière concerne le salarié dont la présence sur le lieu de travail est nécessaire pendant une période d’inactivité.

Organisation du temps de travail et CSE

Tous les cas d’école décrits plus haut doivent quoi qu’il en soit faire l’objet d’une consultation du CSE. Le Comité Social et Économique représente les intérêts des salariés. Or, nous l’avons vu en introduction, l’organisation du travail doit être définie en fonction des besoins de l’entreprise, mais aussi des intérêts des salariés. Le CSE, en tant qu’instance représentative du personnel, sera alors le porte-parole s’assurant du respect de ceux-ci. Il étudiera toute organisation du travail nécessitant de sortir des grandes lignes (35 heures, horaires classiques…). Et ce, pour garantir les conditions de travail des employés.

Le CSE doit également coordonner la mise en place de certains dispositifs, comme le recours aux astreintes ou aux horaires individualisés.

Sauf accord collectif, l’employeur consulte le CSE chaque année sur ce thème, parmi les autres sujets obligatoires soumis à négociation collective. En l’absence de représentants du personnel, c’est l’inspection du travail qui validera ce type de dérogations au système général.

Cas de la réorganisation du travail

Dans le cas où l’entreprise modifie son activité, une nouvelle organisation du temps de travail peut se mettre en place. En cas de changements de ce type, l’employeur doit réunir le CSE pour l’informer le consulter sur la question. Le chef d’entreprise présentera alors le programme indicatif de la variation de la durée du travail sur la période définie. Cela fait partie des missions du CSE d’analyser les propositions, ou d’en formuler, de façon à trouver le bon compromis.

L’entreprise doit notifier tous les éventuels impacts des changements d’organisation sur la rémunération auprès du CSE.

Si ce sont juste les horaires, collectifs ou individuels qui changent, la rémunération est alors indépendante de l’horaire réel. Le calcul se fait sur une base de 35 heures hebdomadaires. En revanche, l’inclusion d’heures supplémentaires, astreintes et autres peut modifier l’organisation du travail. On comptera alors des majorations ! La consultation du CSE par l’employeur pourra alors aboutir à la mise en place d’un accord collectif. Il conviendra d’y prévoir les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d’horaires de travail. À défaut de précision, le délai de prévenance des salariés en cas de changements d’organisation de travail est par défaut de 7 jours.

L’organisation du travail implique des obligations

Toutes les entreprises ne fonctionnent pas pareil et se retrouveront donc dans l’obligation d’adapter leur organisation de travail à leur activité. Que ce soit dans la mise en place initiale de cette organisation, ou dans sa modification, il faudra quoi qu’il en soit que l’employeur consulte le CSE sur le sujet. Le CSE est l’instance unique de représentation du personnel. Elle doit donc s’assurer du bon respect des intérêts des salariés et leurs conditions de travail.

L’organisation du travail doit ainsi répondre tant aux besoins de l’entreprise que ceux de l’employé.

Auteur de l'article: Philippe Lesueur-Picot

Avant d’exercer en qualité de Responsable des Ressources Humaines, Philippe Lesueur a également fait ses armes en tant que Responsable Qualité Sécurité Environnement. Confronté très tôt aux problématiques des conditions de travail et des relations au travail, il a bâti des solutions afin de prévenir les risques professionnels.