Statut et contrat du VRP exclusif

Par Adrien KrasLe 15 juin 2017

Le VRP exclusif est un « voyageur, représentant, placier » exerçant une activité de représentation commerciale pour le compte d’un employeur unique. Il est à distinguer du VRP multicartes lequel, vous l’aurez deviné, est au service de plusieurs entreprises et ne sera pas étudié ici.  Le VRP est, avant toute chose, un salarié titulaire d’un contrat de travail (article L7313-1 du code du travail). Il bénéficie donc à ce titre des dispositions du contrat de travail et des accords collectifs applicables dans l’entreprise. Il dépend également du régime général de la sécurité sociale (article L311-3 du code de la sécurité sociale). Toutefois, l’activité particulière du VRP exclusif justifie certaines spécificités et dérogations au droit commun.

Il existe donc un statut spécifique au VRP défini notamment par un accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975.

Conditions opposées au statut du VRP exclusif

L’article L7311-3 du code du travail définit les conditions nécessaires pour se prévaloir du statut de VRP. En premier lieu, il est impératif d’exercer une activité de représentation.  Celle-ci consiste à prospecter une clientèle de l’entreprise aux fins de prises et de transmission de commandes. Elle doit être exercée à titre exclusif et constant. En réalité, il est possible d’exercer d’autres activités à condition que ce soit au service de la même entreprise qui l’emploie pour sa mission de représentation et que cette dernière activité demeure prépondérante. Le VRP a en outre l’interdiction d’effectuer des opérations commerciales à titre personnel. Il doit également être lié à son employeur par une convention définissant les services ou biens destinés à la vente et précisant la zone géographique ou le type de client démarché, ainsi que son taux de rémunération. Ce taux est le plus souvent fixé par un pourcentage des ventes obtenues. Enfin, pour être qualifié de VRP exclusif, le salarié doit exercer son activité pour le compte d'un employeur unique.

L’ensemble de ces conditions doit être réuni pour que le statut soit applicable. Ce statut est d’ordre public, c’est-à-dire qu’il n’est pas possible d’y déroger même en cas d’accord entre l’employeur et le salarié.

À l’inverse, si l’une ou plusieurs de ces conditions ne sont pas remplies, il est possible de se mettre d’accord pour reconnaître la qualité de VRP. On parle alors d’application conventionnelle du statut. Bien sûr, les dispositions de droit commun plus favorables pour le salarié se substitueront dans ce cas à celles propres aux VRP. Le VRP « conventionnel » aura par exemple droit au paiement d’heures supplémentaires alors que celles-ci sont, en principe, incompatibles avec le statut (Cass. Soc 17 décembre 2002 n°00-44.375).

Quel type de contrat pour un VRP exclusif ?

Le VRP peut indifféremment conclure un CDD ou un CDI avec son employeur. Seul impératif : recourir à un écrit faisant mention des conditions d’exercice de l’activité à l’image du taux de rémunération. Que se passe-t-il en l’absence d’écrit ? Le salarié bénéficie d’une présomption qui lui permet, sauf preuve contraire apportée par l’employeur, d’être considéré comme un VRP. L’entreprise devra alors démontrer que les conditions impératives à la reconnaissance du statut ne sont pas réunies. 

Autre particularité, la durée de la période d’essai diffère de celle du droit commun des salariés.

Elle est en effet de 3 mois maximum et ne peut être prolongée au-delà de ce terme. Ce régime est plus avantageux que celui applicable au salarié ordinaire dont la période d’essai peut s’étendre jusqu’à 4 ou 8 mois, renouvellement inclus, selon son niveau de qualification.

Quelle rémunération prévoir pour le VRP exclusif ?

La rémunération du VRP exclusif peut être calculée selon plusieurs modalités. Il peut d’abord s’agir d’un salaire fixe, indépendant du volume de vente réalisé. Il est également possible d’opter pour un salaire composé uniquement de commissions. Rien n’empêche, enfin, de combiner les deux modes et de prévoir un salaire constitué d’un fixe et d’une partie variable. Cette dernière formule est souvent la plus intéressante en ce qu’elle permet une certaine sécurité financière tout en permettant d’être récompensé pour la performance réalisée. En principe, les commissions sont dues sur ordres directs, c'est-à-dire les affaires directement traitées par le VRP. L’usage ou le contrat peut cependant prévoir des commissions sur ordres indirects. Il s’agit des commandes émanant de clients compris dans le portefeuille du VRP, mais qui ne résultent pas directement de son intervention.

Le droit à commission est normalement acquis dès que la commande est transmise, peu important que celle-ci soit ou non exécutée.

Une « clause de bonne fin » insérée dans le contrat peut toutefois prévoir que le droit à commission sera conditionné par l’exécution effective de la commande. Cette clause ne peut cependant s’appliquer que si le défaut d’exécution n’est pas dû à une faute de l’employeur. Aussi, elle ne peut en aucun cas conduire à ce que le VRP se trouve privé de sa commission sur des contrats ultérieurement réalisés. Ainsi, est nulle la clause prévoyant un retrait de commissionnement  automatique au terme d’un délai d’un mois même en cas de paiement ultérieur de la commande (Cass. Soc 25 mars 2009 n°07-43.587).  

Les VRP exclusifs bénéficient d’une ressource minimale forfaitaire.

Ce minimum garanti vise en effet à contrebalancer l’impossibilité pour le représentant de compléter sa rémunération en louant ses services à une entreprise tierce. Ce minimum n’étant pas dû aux VRP multicartes, il est conditionné par la présence d’une clause d’exclusivité dans le contrat (Cass. Soc 23 septembre 2003 n°01-43.636). Il convient donc d’être particulièrement attentif sur ce point lors de la conclusion du contrat. Le montant de cette ressource minimale forfaitaire est fixé à 520 fois le taux du SMIC horaire. 

Durée du travail et congés des VRP exclusifs

Le VRP est parfaitement libre et indépendant dans l’organisation de son activité. Dès lors, son temps de travail n’est pas décompté et il ne profite pas des règles légales encadrant la durée du travail, notamment la durée légale des 35 heures. Ce qui explique pourquoi ils n’ont, comme nous l’avons vu, pas droit au paiement d’heures supplémentaires. Le statut de VRP exclusif nécessite donc des qualités certaines d’organisation afin de ne pas se laisser déborder et de conserver un certain équilibre entre vies personnelle et professionnelle.

Par ailleurs, le VRP ne bénéficie pas du paiement des jours fériés chômés.

Il jouit en revanche des congés payés qu’il acquiert et pose selon les règles communes à tous les salariés. Pendant ses vacances, le VRP perçoit une indemnité égale à la rémunération moyenne perçue sur une durée équivalente lors de l’année précédente. Le versement de cette indemnité ne l’empêche pas de percevoir, dans le même temps, les commissions dues pour les ventes réalisées avant son départ en congé (article D7313-1 du code du travail). Le VRP bénéficie également de congés pour événements familiaux en cas de mariage ou de décès d’un proche.

Sort réservé à la rupture du contrat de travail

Si les modes de rupture du contrat de VRP sont les mêmes que celles du droit commun, certaines règles spécifiques lui sont néanmoins applicables. Ainsi, la durée de son préavis est de 1 mois durant la première année de présence, 2 mois à compter de la deuxième année et 3 mois au-delà (article L7313-9 du code du travail). Par ailleurs, la rupture du contrat du VRP exclusif donne lieu au paiement de diverses indemnités spécifiques. Il s’agit en premier lieu des commissions et remises concernant les ordres transmis postérieurement à la date de départ, mais directement liées à son activité. La période prise en compte est fixée par les usages et ne peut en tout état de cause dépasser 3 ans. Sauf faute grave, le licenciement du VRP lui donne également droit à une indemnité de clientèle. Celle-ci vise à compenser le préjudice subi par la perte du portefeuille de clients qu’il a lui-même développé. Son montant est fixé au cas par cas, en principe par accord des parties au moment du départ ou, à défaut, par décision judiciaire.

Conseil d'Expert

Le VRP peut, dans les 30 jours de la rupture et à condition d’être âgé de moins de 65 ans, renoncer à cette indemnité de clientèle au profit d’une indemnité spéciale de rupture.

Son montant dépend directement de la moyenne mensuelle du montant des salaires et du nombre d’années d’ancienneté du salarié. Pour le VRP de 65 ans et plus, l’indemnité spéciale est remplacée par une indemnité conventionnelle de départ en retraite. Le VRP justifiant de deux ans d’ancienneté, âgé de moins de 65 ans et éligible à l’indemnité de clientèle a droit, en outre, à une indemnité conventionnelle de rupture, calculée selon des modalités voisines de celle de l’indemnité spéciale.

Celle-ci, tout comme l’indemnité de clientèle et ses substituts, n’est pas cumulable avec l’indemnité de licenciement.

Auteur de l'article: Adrien Kras

Titulaire d’un Master 2 en Droit et du Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat, Adrien KRAS a prêté sa collaboration au sein de divers cabinets au service d’une clientèle de particuliers et d’entreprises de toutes tailles. Spécialisé en droit social, il exerce actuellement en qualité de juriste conseil au sein d’une organisation professionnelle.