La qualité de vie au travail est un enjeu
Le 21 mai 2017La qualité de vie au travail joue un rôle primordial dans l’image de marque d’une entreprise (10 questions sur la QVT). C’est devenu un réel enjeu pour les entreprises. Le palmarès Great Place To Work 2017 récompense ainsi les entreprises ayant placé l’épanouissement de leurs collaborateurs au centre de leur stratégie managériale. Le bien-être au travail est toutefois davantage qu’un simple facteur d’attractivité puisqu’il concerne avant tout la santé du salarié. Le 3ème Plan Santé au travail 2016-2020 en a ainsi fait l’un de ses principaux axes stratégiques.
Conscient de l’importance économique et sociétale de la qualité de vie au travail, le législateur l’a érigé au rang de thème de négociation obligatoire dans l’entreprise.
Signataires d’un accord sur la qualité de vie au travail
Se pose d’abord la question de périmètre de la négociation. L’accord sur la qualité de vie au travail se négocie au niveau de l’entreprise et non au sein de chacun de ses établissements. En revanche, cet accord peut être conclu au niveau d’un groupe. Les entreprises filiales sont alors déliées de leur obligation de négociation annuelle. Une entreprise est concernée par l’obligation d’ouvrir des négociations sur la qualité de vie au travail dès lors qu’elle compte au moins une section syndicale et un délégué syndical respectivement constitués et désignés par un syndicat représentatif (article L2242-1 du code du travail).
Pour rappel, un syndicat est représentatif s’il a obtenu au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections professionnelles.
En tout état de cause, les entreprises de moins de 11 salariés sont exclues du champ de la négociation obligatoire. Il s’agit en effet du seuil d’effectif en dessous duquel la désignation d’un délégué syndical ne peut être envisagée.
Contenu de l’accord sur la qualité de vie au travail
L’article L2242-8 du code du travail dresse la liste du contenu minimum de cette négociation. Il s’agit d’une liste non exhaustive et il est bien entendu possible d’y ajouter d’autres sujets ayant trait au bien-être dans l’entreprise. L’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle des salariés doit ainsi être abordé. Il peut tout d’abord s’agir des conditions de travail dans l’entreprise. Ce peut être l’occasion, par exemple, d’adopter des principes relatifs à l’organisation des réunions afin d’éviter qu’elles se tiennent à des horaires trop tardifs, incompatibles avec une vie de famille. Il est également possible de prévoir des mesures telles que le télétravail. Celui-ci permet au salarié volontaire d’effectuer une à plusieurs journées de travail hebdomadaire à son domicile. Pratique pour aller chercher les enfants à l’école ou réceptionner un colis ! Il peut également être question d’instaurer des services tels qu’une crèche d’entreprise ou la livraison de courses à domicile…
L’épanouissement au travail passe également par le vivre-ensemble. C’est pourquoi la négociation doit en outre concerner la lutte contre les discriminations dans l’entreprise et aux mesures en faveur de l’emploi des personnes handicapées. Dans les entreprises de 20 salariés et plus, ce dernier sujet est abordé sur la base d’un rapport de l’employeur sur son obligation d’embauche de personnes atteintes de handicaps (articles L2242-11 et L5212-1 et suivants du code du travail).
Avis de l'auteur
La mise en place d’un régime de protection sociale complémentaire dans l’entreprise est ainsi couverte par l’obligation de négocier. Elle concerne la prévoyance, mais également la mutuelle santé obligatoire. De la même façon, la communication au sein de l’entreprise est gage de relations de travail sereines et constructives. C’est donc tout naturellement que le droit d’expression des salariés doit être abordé dans le cadre de la négociation. Enfin, on ne saurait ignorer l’utilisation des nouveaux outils de communication numérique et des risques psychosociaux susceptibles d’en résulter.
La loi travail précise le contenu de la qualité de vie au travail
Le droit à la déconnexion a ainsi été introduit par la loi Travail parmi les thèmes de la qualité de vie au travail. L’accord doit prévoir les modalités d’exercice de ce droit par les salariés ainsi que des outils de gestion de l’utilisation des ressources numériques. Ces dispositions doivent viser l’effectivité des temps de repos et de congé et l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale. Si la négociation n’aboutit pas, l’employeur sera alors obligé d’adopter, après avis des représentants du personnel, une charte sur le droit à la déconnexion dans l’entreprise. Cette charte devra également prévoir des actions de sensibilisation et de formation à une utilisation raisonnable des outils numériques.
Cela concerne les entreprises de 50 salariés et plus (ou appartenant à un tel groupe) et dont la moitié au moins du personnel est exposé à des risques professionnels (articles L4161-1 et D4163-1 et suivants du code du travail). Au-delà de ces prescriptions légales, il est bien entendu permis de faire preuve d’inventivité afin de proposer des mesures originales visant le bien-être des salariés au travail. Pourquoi ne pas envisager l’aménagement d’une salle de sieste ? Proposer des cours de yoga ? Prévoir l’intervention d’un ergonome ? Après tout, il n’est pas interdit de rêver !
Il est bien de souligner le fait que le code du travail associe la négociation sur la qualité de vie au travail à celle concernant l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’entreprise.
Les deux sujets peuvent cependant aboutir à deux accords distincts. Précisons également que depuis le 1er janvier 2016, entre dans le rôle du CE (comité d’entreprise), la faculté de désigner un expert technique dans le cadre de la négociation portant sur les matières de l’égalité professionnelle dès lors que l’effectif de l’entreprise le justifie (article L2325-38 du code du travail). Toutefois, ce dernier devra aboutir à un accord avec l’employeur.
Négociations sur la qualité de vie au travail
La fréquence de la négociation sur la qualité de vie au travail est annuelle. Il est possible de réviser cette fréquence dans la limite d’une périodicité de trois ans maximum. Cette modification devra toutefois être prévue par un accord majoritaire, c’est-à-dire signé par des syndicats représentant plus de la moitié des suffrages exprimés aux dernières élections ou validés par la majorité des salariés. L’employeur prend ainsi, chaque année, l’initiative d’ouvrir les négociations. Il dispose pour ce faire d’un délai de 12 mois partant de la clôture des précédentes négociations. À défaut, le syndicat représentatif dans l’entreprise pourra prendre le relais et solliciter l’engagement des discussions.
L’employeur est dans obligation de faire droit à cette demande, faute de quoi il se rendrait coupable d’un délai d’entrave.
Le code du travail impose la tenue d’une première réunion en vue d’établir le calendrier de négociation et de fixer le lieu où se dérouleront les réunions. Le planning des réunions n’a pas vocation à être déterminé par l’employeur seul, mais en concertation avec les syndicats. Cette première réunion doit également permettre de dresser la lister les informations qui seront ultérieurement remises aux négociateurs syndicaux (article L2242-2 du code du travail). Le code donne peu d’indications sur la suite des opérations. Ainsi, la législation en vigueur vise prioritairement une « première réunion », on peut en conséquence en déduire que deux réunions au minimum doivent être organisées. Sauf cas d’urgence, le pouvoir de décision de l’employeur est gelé pendant le déroulement des négociations (article L2242-3 du code du travail).
En cas de succès des négociations, un accord d’entreprise est conclu selon les règles habituelles de la négociation collective. En cas d’échec, un procès-verbal de désaccord doit être rédigé.
Les propositions émises en dernier lieu par l’employeur et les syndicats doivent y figurer, ainsi que les mesures que la direction entend mettre en œuvre pour pallier à l’absence d’accord (article L2242-4 du code du travail).