La rédaction du PV de CE devient un enjeu
Le 18 avril 2016Le comité d’entreprise est désormais tenu de rédiger les procès-verbaux de réunion en un temps record ! C’est du jamais vu et la nouvelle sonnante et trébuchante vient de tomber (décret n°2016-453 du 12 avril 2016). La rédaction du PV de CE doit à défaut d’un accord se faire dans les quinze jours suivant la réunion (article D2325-3-1 du code du travail). Et encore, ce délai maximal n’est valable que pour les réunions dont l’enjeu n’est ni un plan de sauvegarde l’emploi – PSE (article L1233-30 du code du travail), ni une liquidation ou un redressement judiciaire. En effet, dans le premier cas, le délai est réduit à trois jours, dans le second, il ne reste plus qu’un seul jour au secrétaire. Autant dire que la rédaction du PV de CE devient un enjeu non négligeable.
Il est fini le temps où le secrétaire du CE pouvait à loisir différer la rédaction du procès-verbal de plusieurs semaines voire de plusieurs mois.
La loi cadre la rédaction du PV de CE
Nous l’avons dit ci-dessus, le délai de rédaction se resserre. Insistons encore un peu plus en soulignant que le secrétaire doit dans tous les cas produire le PV du CE avant la réunion suivante. Le code du travail enfonce donc le clou en précisant qu’une réunion intervenant avant le terme des quinze jours visés ci-avant, oblige le secrétaire à produire plus rapidement le procès-verbal du CE (règle applicable au délai de trois jours également). Bref, la rédaction du PV de CE implique une exigence de tous les instants et surtout une importante réactivité du secrétaire.
Plus que jamais ce dernier aura besoin du concours des élus de l’instance pour rédiger qualitativement les PV du CE. Tous les membres doivent se sentir concernés par cette obligation légale.
Comment optimiser la rédaction du PV de CE ?
Il devient donc essentiel de professionnaliser la démarche de rédaction. Le secrétaire doit se former rapidement aux techniques de rédaction (pourquoi pas un stage complet de dactylographie et de prise de notes) et accepter cette responsabilité rédactionnelle sans jamais faillir. Il en va de la notoriété et de la respectabilité du comité d’entreprise tant vis-à-vis de l’employeur (qui sera sans nul doute ravi de cette évolution législative issue de la loi Rebsamen) qu’à l’endroit des salariés de l’entreprise.
Un accord est utile
1/ Préparer les réunions du CE
L’absence de préparation de réunion débouche le plus souvent sur un ordre du jour inconsistant et une réunion désorganisée, voire désordonnée et donc un procès-verbal qui sera le reflet de cette approche légère et inefficace. De surcroit, la première étape à privilégier est incarnée par la réunion préparatoire. Bien que facultative, elle est pourtant devenue avec le temps, incontournable. Il est important que les élus se réunissent pour discuter ensemble des points dont ils souhaitent débattre avec l’employeur. C’est une façon de poser leurs idées, d’accorder leurs violons ; à l’issue d’une telle réunion, le secrétaire disposera d’un projet d’ordre du jour qu’il défendra auprès de l’employeur. Il pourra aussi compter sur une feuille de route fixée avec les membres du CE.
2/ Rédiger les questions et les arguments du CE
En marge des points fixés à l’ordre du jour, il est conseillé de préparer ensemble, la liste des questions utiles qui seront posées à l’employeur durant la réunion plénière. De même, il est préférable d’écrire avec précision, les arguments du CE qui visent d’une part à présenter l’objet et les raisons des demandes des élus et d’autre part, leurs attentes (vœux du CE). En clair, écrire en amont ce qui sera dit à l’oral en aval lors de la réunion (et surtout s’y tenir), fait gagner du temps. Le secrétaire peut ainsi compter sur un document complet contenant l’ensemble des argumentaires, base logique de ce qui sera traduit dans le procès-verbal. Si le gain de temps est indiscutable, l’intérêt est aussi de ne pas être contesté quant aux contenus repris exhaustivement dans le PV du CE.
3/ Demander plus de contenus écrits à l’employeur
L’employeur a l’habitude de présenter des informations économiques et sociales lors des réunions ; problème, la plupart du temps, il le fait à l’oral sans jamais produire de résumés ou de synthèses aux élus. Le secrétaire doit donc prendre des notes, des notes et toujours des notes, parfois sans capter le sens des syntaxes, du vocabulaire technique. Si on ajoute à cela, que les élus ne prennent pas de notes de leur côté, on obtient le cocktail Molotov qui fera exploser en éclats la qualité du procès-verbal. Autant dire qu’il est impératif de faire collaborer tout ce beau monde. Le secrétaire (et le CE dans son ensemble) peut donc s’assurer de cette nécessaire contribution au service de la rédaction du PV de CE.
Il peut de facto demander à l’employeur, qu’il produise des écrits aussi souvent que possible afin de faciliter tant la prise de notes en séance plénière que la transcription à l’issue de celle-ci (en off). Notons que les consultations du CE sont obligatoirement nourries d’informations écrites ; il s’agit dans ce cas précis, d’un préalable légal (article L2323-4 du code du travail).
4/ Enregistrer les débats
Depuis longtemps déjà, le comité d’entreprise avait la possibilité d’enregistrer les débats lors de ses réunions. Cette faculté n’avait pas fait l’objet d’une règle légale et reposait en réalité sur un principe jurisprudentiel. L’employeur tentait bien de s’y opposer. Plusieurs arrêts concouraient en réponse à la liberté de choix du CE qui pouvait se passer de l’autorisation de l’employeur. Depuis le 15 avril 2016, cette possibilité a été inscrite dans le code du travail. Il n’y a donc plus de doute quant au fait que les réunions peuvent être enregistrées (article D2325-3-2 du code du travail). La décision appartient comme cela a toujours été le cas, soit à l’employeur soit à la majorité des membres du CE.
Cette décision collective peut être inscrite dans le règlement intérieur du CE. Il faut que ce dernier ait fait l’objet d’une résolution le temps d’une réunion.
5/ Se faire assister d’un rédacteur professionnel
Là encore, point de surprise sinon que la loi renforce le fait que le comité d’entreprise peut décider de se faire assister d’un rédacteur ou d’un sténotypiste (Cass. Soc. 8 oct. 2014, n° 13-17.133). L’employeur ne peut pas l’en empêcher (article D2325-3-2 du code du travail). Le recours à ce professionnel n’est cependant pas ouvert à tous les budgets de fonctionnement. Le secrétaire reste en outre, maître de son PV de CE ; le rédacteur n’ayant pour mission que de prendre des notes lors de la réunion et de les restituer au plus tôt. Il est fort à parier que l’argument de la rapidité d’exécution de cette tâche sera sans doute, l’un des futurs arguments commerciaux des agences de rédaction de PV.
À ce jour, elles sont toutefois nombreuses à ne pas les respecter alors qu’elles étaient contractuellement tenues à la production de PV en un mois. L’enjeu sera donc de taille.
Retards lors de la rédaction du PV de CE
La loi reste muette en revanche tant sur l’absence de production du procès-verbal par le secrétaire du CE, que sur les éventuels retards pour les produire avant les réunions. Aussi, il faut s’en remettre au fait qu’en ne réalisant pas dans les délais, le PV du CE, le secrétaire entrave le fonctionnement normal de l’instance (article L2328-1 du code du travail), s’exposant de facto à un délit d’entrave . L’employeur pourrait rappeler à l’ordre le secrétaire en l’inciter au respect de ses responsabilités. Les élus du CE pourraient aussi le destituer pour se doter d’un secrétaire plus respectueux des délais. Sur le plan civil, tant l’employeur que les élus pourraient demander au juge de presser le pas du secrétaire. Il va de soi qu’un retard occasionnel ne peut pas être sanctionné surtout si le secrétaire de bonne foi met tout en œuvre pour rédiger le PV du CE.
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