Lutter contre le gaspillage alimentaire, que penser du nouveau label ?
Le 1 décembre 2023Le gaspillage alimentaire a une incidence sur l’économie, l’environnement, la précarité, l’exclusion sociale… L’impact de ce phénomène sur l’ensemble des étapes de la chaîne alimentaire : de la production à la consommation est indéniable. Du fait des enjeux en présence, il devenait urgent de prendre des mesures pour réduire les pertes et gaspillage. Le nouveau label national anti-gaspillage alimentaire lancé le 1er mars 2023, issu de la loi n°2020-105 du 20 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à une économie circulaire, entend prendre le contre-pied de ce phénomène en valorisant les acteurs de cette chaîne alimentaire.
Pourquoi la nécessité de créer un label national anti-gaspillage alimentaire ?
Chaque année, ce sont des tonnes de déchets produits et de la nourriture gaspillée.
Constat et chiffres alarmants sur le gaspillage alimentaire en Europe
Selon Eurostat, en Europe, rien qu’en 2020, près de 59 millions de tonnes de denrées alimentaires ont été gaspillées. En France, pour la même année, les chiffres avoisinent les 9 millions. Le constat est alarmant. En effet, c’est à peu près 140 kg de nourriture gaspillée par an et par habitant, des chiffres nettement supérieur aux autres pays de l’UE. En termes de coût, cela équivaut en moyenne à 16 milliards d’euros à la poubelle.
Le gaspillage alimentaire avant la loi AGEC : impacts environnementaux, sociaux et économiques
Le gaspillage alimentaire a sans aucun doute une incidence sur le volet environnemental eu égard aux émissions de gaz à effet de serre. En effet, la production, la transformation tout comme la distribution des produits alimentaires nécessitent des ressources naturelles. Il s’agit de l’eau, l’énergie, les sols. Les utiliser plus que de raison est tout bonnement inutile et pourrait être évité.
S’agissant des impacts sociaux, cela occasionne une « insécurité alimentaire » alors même que de nombreuses personnes sont confrontées à des difficultés économiques et peine à se nourrir convenablement. Ce phénomène accentue la précarité alimentaire.
Enfin, sur le plan économique, cela occasionne également des pertes à l’échelle nationale : surplus d’invendus, déchets alimentaires générés et les coûts pour les gérer…
La succession de lois en faveur des actions et initiatives de lutte contre le gaspillage alimentaire
Plusieurs lois ont vu le jour, c’est le cas de :
► La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : celle-ci a introduit des mesures pour lutter contre le gaspillage alimentaire dans le secteur de la restauration collective publique : restauration du travail, scolaire,…
► La loi Garot : n° 2016-138 du 11/02/2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire met notamment l’accent sur les distributeurs de produits alimentaires. Elle prévoit le don des invendus aux associations et l’interdiction de rendre impropre à la consommation ces produits alimentaires encore consommables.
► La Loi agriculture et alimentation (loi EGALIM) adoptée en 2018 prévoit d’étendre le don alimentaire aux opérateurs de l’industrie agro-alimentaire ainsi que de la restauration collective et privée.
► Le pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire vise à prendre des mesures concrètes et sensibiliser les acteurs concernés par la chaîne alimentaire dans le but de réduire le gaspillage alimentaire. Il vise l’innovation avec l’émergence de nouvelles pratiques, la prévention du gaspillage, la coopération entre ces différents acteurs dans cette lutte.
Le nouveau label national au secours du gaspillage alimentaire
Ce label anti-gaspillage peut avoir des effets potentiels sur les habitudes des consommateurs tout comme les acteurs y concourant.
Le gaspillage alimentaire depuis la loi AGEC
La loi AGEC impose des obligations de transparence des acteurs de la chaîne alimentaire en privilégiant le don alimentaire. Mais aussi en interdisant la destruction des denrées pouvant encore être consommées, ainsi que l’identification de ceux engagés dans cette lutte grâce à ce nouveau label.
Les objectifs de cette loi dont concours le label anti-gaspillage alimentaire sont de :
- Réduire de moitié d’ici à l’horizon 2025 le gaspillage dans les domaines de la distribution alimentaire et la restauration collective ;
- Dans les autres domaines liés à la consommation, la production, la transformation, la restauration commerciale d’ici 2030.
Label antigaspi ou comment récompenser les acteurs engagés : focus sur les trois niveaux de reconnaissance
Ce label prévoit 3 niveaux de reconnaissance pour les acteurs concernés comme les GMS : supermarchés, hypermarchés, grossistes, boulangers, bouchers, charcutiers, etc.
- Le premier concerne leur engagement dans la lutte contre le gaspillage alimentaire avec une étoile.
- Le deuxième, leur maîtrise : ceux ayant atteint des résultats significatifs en évitant au maximum les pertes alimentaires.
- Le troisième, leur exemplarité pour la réduction et les mesures mises en place pour lutter contre ce phénomène avec trois étoiles attribuées.
Ces étoiles ont leur importance : permettre aux consommateurs d’identifier les acteurs engagés grâce à un logo bien spécifique, tout en encourageant d’autres du secteur alimentaire à faire de même par l’adoption de pratiques similaires.
Pour recevoir l’une de ces étoiles, il faut suivre une procédure d’agrément. Bon nombre d’acteurs peuvent y concourir comme ceux de la distribution, les établissements et magasins… Leur candidature est analysée par un organisme certificateur (AFNOR certification, Ecovert France…agréé par le ministère de la Transition écologique de la Cohésion des territoires). C’est ce dernier qui donnera l’agrément, le cas échéant.
Bon à savoir : l’ensemble des informations nécessaires pour candidater figurent sur le site du ministère de la transition écologique, rubrique label national anti-gaspillage alimentaire.
Efficacité du nouveau label : privilégier une étude à long terme
Le gaspillage alimentaire est un fléau pour l’environnement. Tout le monde est concerné par ce phénomène tant les ménages que les entreprises, tous secteurs confondus : la production, la transformation, la distribution… ; les restaurants et autres services de restauration. Encourager les acteurs au cœur de ce phénomène dans cette lutte, renforcer les sanctions en cas de destruction d’invendus consommables, ainsi que le suivi et le contrôle par les opérateurs de la qualité du don…, sont des stratégies qui peuvent s’avérer payantes.
Cependant, pour que l’on puisse tirer le plein potentiel de ce label antigaspi, encore faut-il qu’il s’affranchisse de cette vision d’outil à visée « communicationnelle » uniquement, superfétatoire ; sans réellement mesurer ses effets sur le comportement des acteurs de la chaîne alimentaire et les consommateurs.
Rien ne s’oppose à ce qu’à la longue, il participe à produire le résultat escompté : réduire le gaspillage alimentaire. En somme, avec ce label, l’on peut espérer des efforts globaux des acteurs du secteur alimentaire et faire face réellement à ce problème. Il est essentiel de tenir compte des effets de la loi AGEC sur le long terme. Mais aussi de ce nouveau label « antigaspi » perçu comme un levier pour encourager les actions positives des professionnels du secteur alimentaire. Et ce, grâce à ses critères et exigences spécifiques pour en bénéficier. Entre autres sur la procédure d’agrément.
Compte tenu des enjeux en présence, il est indéniable que ce nouveau label revêt une importance capitale. En effet, il existe pour répondre à un problème urgent : lutter contre le gaspillage alimentaire.