Le statut des salariés protégés
Le 19 avril 2015Saviez-vous qu’être élu (représentant du personnel) conférait au salarié concerné, le statut de salarié protégé ? Ce statut dit protecteur a été institué afin de protéger les membres des délégations du personnel (comité d’entreprise, délégué du personnel, CHSCT et organisations syndicales) de discriminations ou de sanctions arbitraires eu égard à leur mandat.
Ainsi, un employeur ne peut pas librement et sans contrôle a minima, licencier les salariés protégés. Il devra se conformer à une procédure spéciale impliquant notamment l’autorisation de l’inspection du travail agissant comme une autorité administrative et judiciaire.
Zoom sur la procédure de licenciement des salariés protégés
Dès lors que l’employeur souhaite licencier un salarié (pouvoir disciplinaire ou économique), il doit se conformer à des règles édictées et prévues par le code du travail. Toutefois, si le salarié en question est détenteur d’un mandat de représentant du personnel, une procédure spéciale a été instituée pour les salariés protégés.
L’employeur doit commencer par convoquer ledit salarié à un entretien préalable de licenciement.
Cette mesure concerne tous les salariés protégés qu’ils soient délégués du personnel (article L1232-2 du code du travail), membres du comité d’entreprise (article L2411-8 du code du travail), élus du CHSCT (article L2411-13 du code du travail) ou représentants syndicaux (article L2142-1-2 du code du travail).
Cet entretien doit nécessairement avoir lieu avant la seconde étape de la procédure qui consiste à informer et consulter le comité d’entreprise (article L2421-3 du code du travail) de tout licenciement d’un salarié protégé que le motif soit d’ordre personnel (disciplinaire) ou économique (article R2421-8 du code du travail).
Le comité d’entreprise doit auditionner les salariés protégés avant de délibérer et de rendre un avis (article R2421-9 du code du travail) à la majorité des membres titulaires présents (ou de leurs remplaçants, s’il y a lieu).
Précisons contrairement aux pratiques observées et aux idées reçues, que la résolution qui suivra la consultation du comité d’entreprise doit être exprimée par un vote à bulletin secret. Un vote à mains levées serait de nature à compromettre la procédure. En outre, un tel vote devrait normalement conduire l’inspecteur du travail à refuser l’autorisation de licenciement.
Enfin, une fois l’avis du comité d’entreprise (CE) rendu, l’employeur doit solliciter auprès de l’inspecteur du travail l’autorisation de licencier le salarié protégé (articles L2411-3, L2411-5, L2411-8 et L2411-13 du code du travail).
Il lui adresse son projet ainsi que le procès-verbal de la réunion du comité d’entreprise (article R2421-10 du code du travail). L’inspecteur du travail vérifie la régularité de la procédure spéciale de licenciement du représentant, le respect des procédures et s’assure que le licenciement n’est pas en rapport avec le mandat détenu, brigué ou antérieurement exercé par l’intéressé (articles R2421-7 et R2421-16 du code du travail). Pour s’en assurer, il procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle il doit procéder à l’audition personnelle et individuelle de l’employeur et à celle du salarié concerné (articles R2421-4 et R2421-11 du code du travail).
Sanctions lors d’un licenciement irrégulier des salariés protégés
Lorsque le licenciement des salariés protégés intervient sans demande d’autorisation de la part de l’employeur auprès de l’inspection du travail ou malgré un refus d’autorisation de sa part, il est jugé nul. Le salarié a un droit à réintégration et à indemnisation. Le défaut de réintégration d’un salarié protégé justifie qu’il prenne acte de la rupture de son contrat de travail (Cass. soc. 12 avril 2012, n° 10-28697).
Notons que si le salarié ne fait pas une demande de réintégration, cela lui ouvre droit, entre autres indemnités, à une indemnité « pour violation du statut protecteur » égale à la rémunération qu’il aurait dû percevoir entre la date de la rupture et l’expiration de la période de protection.
Rappelons à ce titre que, pour les délégués du personnel et les membres du comité d’entreprise, la période de protection prend fin 6 mois après la date à laquelle s’achève le mandat (articles L2411-5 et L2411-8 du code du travail). Toutefois, afin de neutraliser les effets de l’augmentation de la durée du mandat des représentants du personnel, passée de 2 à 4 ans en 2005, la Cour de cassation plafonne cette indemnité à 2 ans et 6 mois de salaire soit 30 mois au plus. La Cour de cassation l’a récemment rappelé à l’occasion de deux nouveaux arrêts le 15 avril 2015 (Cass. soc. n° 13-27211 et n° 13-24182). L’employeur risque également d’être poursuivi par l’instance dont dépend le salarié protégé pour délit d’entrave, l’exposant ainsi à une sanction pénale.