Maitriser sa prise de parole en réunion
Le 11 juin 2015Une fois n’est pas coutume, parlons un peu moins de « droit » et un peu plus des élus du comité d’entreprise, en tant qu’individus. Nombreux sont ceux qui n’osent pas s’exprimer au cours d’une réunion plénière (en présence du Président du CE) ou qui se ne sentent pas très à l’aise lorsqu’ils prennent enfin la parole. Certains témoignent de la peur d’être jugé, d’autres de leur frustration d’être systématiquement coupés dans leur élan par des élus quelque peu suffisants voire indélicats.
Le temps d’une réunion est sacré et il doit être respecté et mis à profit. Pourtant, l’indiscipline qui y règne souvent, empêche certains comités d’entreprise d’accomplir sereinement leur mission. C’est sans compter également sur des Présidents de CE très autoritaires qui imposent durant la réunion, tant le rythme que la façon de débattre des sujets, laissant les élus pantois et démunis. Tout ce remue-ménage peut conduire au conflit, ce qui n’est pas souhaitable pour la qualité de la réunion.
Pourquoi le temps des réunions peut-il se transformer en calvaire ou en parcours du combattant ? N’existe-t-il pas des solutions pour faciliter les échanges, la prise de parole et finalement la qualité des débats au cours des réunions plénières ? Parlons peu mais parlons bien ; dans cet article, nous allons vous donner des conseils relevant du bon sens afin de ne plus être éconduits de la sorte.
Une réunion se prépare et ne s’improvise pas
Connaissez-vous des personnes qui courent un marathon sans avoir jamais travaillé leur endurance ? Non ? Peut-être, une raison à cela : la préparation est primordiale pour affronter un challenge de cette taille. Ce qui est vrai dans le sport et pour cet exemple, l’est tout autant lorsqu’il s’agit d’une réunion de travail.
Les points qui doivent être traités au cours d’une réunion impliquent d’en comprendre le sens, la finalité et le fond juridique afin d’être en capacité tant d’en débattre avec l’employeur que de proposer des alternatives à ses propositions.
Nous vous invitons de fait à préparer les réunions. Cette préparation doit être organisée de façon à être productive et efficiente. Par exemple, il conviendrait de désigner un ou plusieurs élus, chargés de se renseigner sur les points de droit entourant les sujets à l’étude et d’en assurer l’information au reste des membres. Un autre, pourrait recenser les attentes de chacun des élus du CE pour l’ensemble des points à traiter (objectifs, désaccords, propositions…), afin d’en extraire les arguments qui seront délivrés le jour de la réunion plénière.
Il va de soi que les membres du CE devront trouver un instant pour se réunir physiquement afin de discuter de visu de la tenue et du déroulé de la réunion plénière. Pour s’éviter la cohue, être épargné de la désorganisation et de tout ce qui peut être la source d’une réunion ratée (perte de temps, pas d’entente possible, aucune stratégie, pas de plan d’actions, absence d’unicité, perte de vue des objectifs, cohérence absente…), il faut appliquer quelques règles utiles.
En début de séance, il est bien de désigner ; un animateur, un chronométreur, une conscience.
Ces trois acteurs de la réunion seront des atouts pour cadrer la séance de travail et recadrer les participants afin que le comité d’entreprise parvienne à l’objectif qu’il se sera fixé. L’animateur joue un rôle déterminant puisqu’il contribue à donner un rythme à la réunion préparatoire en fixant une ligne directrice et en donnant tour à tour la parole aux élus. Ainsi, il permet au comité de décider dès l’ouverture de la séance, des points qui seront abordés (ordre du jour), les objectifs escomptés et les attentes en matière de stratégie (direction à prendre, ce qui peut être envisagé ou négocié, ce qui n’est pas discutable en soi…).
Être animateur oblige à la maîtrise de soi (tout emportement serait dommageable), à être empathique et à l’écoute et d’être doté de qualités managériales pour orchestrer les prises de parole. L’animateur sera aidé par le chronométreur (le maître du temps) ; ainsi, chaque sujet sera encadré par une durée d’étude afin de ne pas allonger inutilement le temps des débats au risque d’échauffer la prise de parole et d’avorter sur des décisions stériles. Il faut adapter le temps qui sera consacré à chaque point. En effet, l’urgence ou l’importance du sujet, sa complexité, son caractère unifiant ou divisant, sont autant d’éléments à prendre en compte pour décider du temps qu’il conviendra d’affecter à chaque sujet de débat.
Le rôle de la conscience est également central car il offre l’opportunité au comité d’entreprise de comprendre ce qui a pu être bloquant ou entravant durant la réunion, empêchant d’atteindre tant les objectifs fixés que la mise en place de la stratégie visée. La conscience est incarnée par un élu choisi en début de séance, lequel n’interviendra ni dans l’étude des points ni dans les débats (il sera en retrait), pour observer le déroulé de la séance afin d’en tirer les enseignements utiles pour améliorer le travail du groupe à chaque nouvelle réunion préparatoire.
À l’issue de la réunion, la conscience exposera à l’ensemble du groupe, ce qu’il a relevé durant la séance comme points à travailler afin d’aboutir toujours plus à la qualité attendue par le CE.
Ainsi, il obligera les intervenants à travers son analyse, à progresser de sorte à être irréprochables tant dans leur attitude que dans leur implication durant une réunion ; ce qui vaut en outre, pour une préparatoire vaut tout autant pour une plénière.
Organiser la prise de parole est essentiel
Les bavards ont tendance à monopoliser la parole et les habitués du silence, n’éprouvent pas l’envie de la prendre. Il y a aussi les timorés qui n’osent pas s'exprimer alors qu’ils ont tant de choses à dire et les frustrés qui manquant d’autorité, finissent par sortir de leur gonds à force de lutter pour conserver la parole. Peut-être vous reconnaissez-vous parmi ces personnalités ?
Le temps d’une réunion peut paraître long pour certains et trop court pour d’autres ; c’est souvent lié au ressenti que nous éprouvons à ce moment-là. Ceux qui ont l’impression de ne pas être à leur place, de perdre leur temps, sont vite agacés par les débats qui peuvent selon eux, traîner en longueur. Pour certains, adorateurs des discussions qui n’en finissent pas, se taire relève du défi ou de la torture et lorsque le gong retenti, il y a comme un arrière-goût d’inachevé. Le temps aurait-il manqué ?
Prendre la parole exige une rigueur et un respect envers son auditoire. Il faut s’assurer que ce faisant, je ne coupe pas la parole même involontairement d’un autre intervenant et que le public soit à l’écoute. Il est nécessaire d’ajuster le ton de sa voix, son débit et sa posture. Le ton de la voix ne doit pas être condescendant ou inquisiteur ; jouez avec les variations de votre voix afin de ne pas tomber dans le piège d’une oralité trop monocorde. Pensez à mesurer votre débit pour ne perdre personne durant votre exposé et préférez des phrases courtes afin d’insuffler une certaine dynamique à votre discours qui devra être précis et intelligible. Adoptez une posture qui invite au débat ; sachez donner la parole en relançant par des questions ouvertes et évitez toute attitude supérieure ou moraliste qui peut bloquer votre débatteur ou contradicteur.
Il faut accepter l’échange de points de vue comme étant un préalable à la possibilité de se ranger derrière une majorité ; chacun doit pouvoir s’exprimer sans craindre le regard des autres. La diversité du débat, la kyrielle d’idées qui pourrait en découler, sont des atouts pour la qualité de la réunion à ne pas négliger.
En conclusion, une réunion qu’elle soit préparatoire ou plénière ne s’aborde pas à la légère.
Les membres du CE doivent avoir conscience que les sujets qui y seront traités sont très importants pour les salariés qu’ils représentent.
Le comité d’entreprise peut le temps d’une formation, apprendre comment aborder sereinement une réunion afin d’en assurer la bonne conduite et la profondeur des débats.